Un Noël
à l'hôpital
Je vous annonce une grande joie. Aujourd'hui nous est né
un Sauveur: c'est le Messie, le Seigneur! (Luc 2, 10-11).
Les fêtes de Noël se suivent et ne se ressemblent pas.
C'est sans doute ce que se disait le Dr Rachel Naomi Remen qui travaillait
cette année-là dans un grand hôpital de New
York. Elle prenait soin de personnes qui y passaient l'hiver parce
que leur condition de santé et de vie ne leur aurait pas
permis de survivre autrement.
Habituée à donner de
son temps et de son expertise généreusement, elle
avait pourtant beaucoup de ressentiment en ce 24 décembre
car on avait fait la liste des médecins de garde pour Noël
et la veille de Noël sans consulter personne. Et on avait assigné
ceux et celles qui n'avaient pas de famille proche ou qui étaient
célibataires.
C'est ainsi qu'elle commença
son service à contrecur, tout en accomplissant les
tâches habituelles. L'après-midi du 24, des organismes
vinrent faire une visite sur l'étage et remirent de petits
cadeaux aux personnes hospitalisées. Mais à la tombée
du jour, ces bénévoles étaient tous eux-mêmes
repartis pour retrouver leurs familles. Et la soirée commença
dans la solitude. Au dehors tombait une douce neige et on voyait
les lumières des décorations dans la ville.
Le Dr Naomi s'acquittait de ses tâches,
allait de chambre en chambre, selon les besoins, le cur triste
et serré.
Jusqu'au moment où Thomas,
l'un des patients, l'invita à entrer dans sa chambre car
il avait quelque chose de spécial à lui dire. Thomas
était un homme qui n'avait jamais pu vivre comme tout le
monde. Toutes ses possessions tenaient dans le tiroir du petit bureau
placé à côté de son lit : un vieux canif,
quelques pièces de monnaie, la clef d'une vieille valise
et ce soir-là deux magnifiques oranges que lui avaient laissées
des gens de l'Armée du Salut.
D'une voix émue, il dit :
« Dr Remen, c'est la nuit de Noël, c'est une nuit bien
spéciale et c'est le moment de faire un cadeau aux gens qu'on
aime. Permettez-moi de vous donner une de mes oranges et de vous
souhaiter un joyeux Noël ».
Le Dr Remen était émue
aux larmes : elle accepta l'orange avec reconnaissance, et sentit
toute sa tristesse et son amertume se dissiper. Et c'est d'un cur
léger et joyeux qu'elle continua ses heures de garde en plein
cur de Noël.
(Adapté du livre du Dr Rachel Naomi Remen, M.D., My Grandfather's
Blessing, Riverhead Books, 2000).
LIEN: Noël est la fête de l'extrême générosité
de Dieu car en nous donnant son Fils, il nous a donné ce
qu'il avait de plus précieux. « La grâce de Dieu
s'est manifestée pour le salut de toute l'humanité
». « Dieu, notre Sauveur, a manifesté sa bonté
et sa tendresse pour toute l'humanité; il nous a sauvés
». Voilà une réalité qui nous dépasse
infiniment mais la célébration vient à notre
secours et nous donne des signes qui nous aident à entrer
dans ce mystère: un couple avec un nouveau-né, des
anges qui annoncent une grande joie, des chants et de la musique
qui nous vont au cur, des lumières qui illuminent la
nuit. Et parmi les anges qui annoncent la Bonne Nouvelle, toutes
ces personnes de bonne volonté, avec un cur généreux,
semblable à celui de Dieu.
* * * * *
L'un
de vous est un Messie!
La Sainte
Famille
Faites-vous un cur plein de tendresse et de bonté,
d'humilité, de douceur et de patience... (Colossiens
3, 12).
Lève-toi, prends l'enfant et sa mère, et fuis
en Égypte (...) Lève-toi, prends l'enfant et sa mère
et reviens au pays d'Israël (Matthieu 2, 13, 20).
L'abbé d'un monastère alla visiter un sage et lui
raconta une histoire de malheur. Il avait été un temps
où son monastère était célèbre
à travers tout le monde occidental. Les cellules débordaient
de jeunes aspirants et dans son église résonnait le
chant des moines. Mais des temps durs étaient apparus pour
son monastère. Il n'y restait plus qu'une poignée
de moines, qui accomplissaient leurs tâches avec des curs
alourdis.
Or, voici ce que l'abbé voulait
savoir : « Est-ce à cause d'un quelconque péché
des nôtres que le monastère a été réduit
à semblable état? »
« Oui, dit le sage: un péché
d'ignorance ».
« Qu'est-ce à dire? »
« L'un des vôtres est
le Messie déguisé et vous n'en savez rien ».
Cela dit, le sage ferma les yeux et reprit sa méditation.
Tout au long du pénible voyage
de retour au monastère, le cur de l'abbé battait
la chamade à la pensée que le Messie - oui, le Messie
lui-même - était revenu sur terre et se trouvait justement
là, dans le monastère. Comment se fait-il qu'il n'avait
pas réussi à le reconnaître? Et qui pouvait-il
bien être? Le frère cuisinier? le frère sacristain?
le frère trésorier? le frère prieur? Non, pas
lui: il avait trop de défauts, hélas. Par contre,
le gourou avait dit qu'il était déguisé. Ces
défauts mêmes ne constituaient-ils pas un de ses déguisements?
Pensez donc : tous les frères du monastère avaient
des défauts. Et l'un d'eux devait être le Messie!
Rentré au monastère,
l'abbé réunit les moines et leur raconta ce qu'il
avait découvert. Ils se regardèrent mutuellement avec
incrédulité. Le Messie? Ici? Incroyable! Mais il était
censé exister ici sous un déguisement. Alors, peut-être.
Et si c'était Untel ou Untel? Ou cet autre, là-bas?
Ou ...
Il y avait ceci de certain : si le
Messie existait au milieu d'eux sous quelque déguisement,
il est improbable qu'ils puissent le découvrir. Aussi, entreprirent-ils
de traiter chacun avec respect et considération. « On
ne sais jamais..., se disaient-ils en eux-mêmes dès
qu'ils entraient en quelque rapport avec autrui: peut-être
est-ce celui-ci ».
Le résultat de tout cela fut
que l'atmosphère du monastère rayonna la joie. Très
tôt des douzaines d'aspirants demandèrent leur admission
dans l'ordre et de nouveau résonna dans l'église le
saint et pieux chant des moines qui rayonnaient l'Esprit d'amour
(A. de Mello, Dieu est là, dehors, pp. 80-81).
LIEN: Marie et Joseph se sont sans aucun doute posé bien
des questions à propos de l'Enfant, de son identité,
de son devenir. Ils nagent en plein mystère. Mais ce sont
des croyants fervents; aussi pressentent-ils à la suite de
la conception de cet Enfant, de sa naissance, de l'avertissement
de fuir la colère d'Hérode... qu'il s'agit d'un être
étonnant et exceptionnel. L'évangéliste Matthieu
fait ressortir la douceur, l'humilité, la patience de Joseph
et la foi qui habite son coeur et celui de Marie. Tellement de questions,
d'inquiétudes, de dérangements, mais en même
temps tellement de courage, de confiance et de sérénité!
Ils sont tout simplement ouverts à l'inattendu de Dieu, disponibles
à son projet; et ils accueillent « le divin » caché
dans tout ce qu'ils vivent.
N'est-ce pas là un exemple
pour les familles d'aujourd'hui quelles qu'elles soient. Chaque
famille connaît des questions, des soubresauts, des ajustements
nécessaires. Il importe que chaque personne soit reconnue
dans sa dignité, traitée avec respect. Les «
yeux de la foi » ne permettent-ils pas alors de considérer
chaque membre de la famille comme un « messie déguisé
» et de le traiter avec « tendresse et bonté, douceur
et patience ».
Chronique
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