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chronique du 21 décembre 2004
 

Un Noël à l'hôpital

Je vous annonce une grande joie. Aujourd'hui nous est né un Sauveur: c'est le Messie, le Seigneur! (Luc 2, 10-11).

 

Les fêtes de Noël se suivent et ne se ressemblent pas. C'est sans doute ce que se disait le Dr Rachel Naomi Remen qui travaillait cette année-là dans un grand hôpital de New York. Elle prenait soin de personnes qui y passaient l'hiver parce que leur condition de santé et de vie ne leur aurait pas permis de survivre autrement.

     Habituée à donner de son temps et de son expertise généreusement, elle avait pourtant beaucoup de ressentiment en ce 24 décembre car on avait fait la liste des médecins de garde pour Noël et la veille de Noël sans consulter personne. Et on avait assigné ceux et celles qui n'avaient pas de famille proche ou qui étaient célibataires.

     C'est ainsi qu'elle commença son service à contrecœur, tout en accomplissant les tâches habituelles. L'après-midi du 24, des organismes vinrent faire une visite sur l'étage et remirent de petits cadeaux aux personnes hospitalisées. Mais à la tombée du jour, ces bénévoles étaient tous eux-mêmes repartis pour retrouver leurs familles. Et la soirée commença dans la solitude. Au dehors tombait une douce neige et on voyait les lumières des décorations dans la ville.

     Le Dr Naomi s'acquittait de ses tâches, allait de chambre en chambre, selon les besoins, le cœur triste et serré.

     Jusqu'au moment où Thomas, l'un des patients, l'invita à entrer dans sa chambre car il avait quelque chose de spécial à lui dire. Thomas était un homme qui n'avait jamais pu vivre comme tout le monde. Toutes ses possessions tenaient dans le tiroir du petit bureau placé à côté de son lit : un vieux canif, quelques pièces de monnaie, la clef d'une vieille valise et ce soir-là deux magnifiques oranges que lui avaient laissées des gens de l'Armée du Salut.

     D'une voix émue, il dit : « Dr Remen, c'est la nuit de Noël, c'est une nuit bien spéciale et c'est le moment de faire un cadeau aux gens qu'on aime. Permettez-moi de vous donner une de mes oranges et de vous souhaiter un joyeux Noël ».

     Le Dr Remen était émue aux larmes : elle accepta l'orange avec reconnaissance, et sentit toute sa tristesse et son amertume se dissiper. Et c'est d'un cœur léger et joyeux qu'elle continua ses heures de garde en plein cœur de Noël.

(Adapté du livre du Dr Rachel Naomi Remen, M.D., My Grandfather's Blessing, Riverhead Books, 2000).

LIEN: Noël est la fête de l'extrême générosité de Dieu car en nous donnant son Fils, il nous a donné ce qu'il avait de plus précieux. « La grâce de Dieu s'est manifestée pour le salut de toute l'humanité ». « Dieu, notre Sauveur, a manifesté sa bonté et sa tendresse pour toute l'humanité; il nous a sauvés ». Voilà une réalité qui nous dépasse infiniment mais la célébration vient à notre secours et nous donne des signes qui nous aident à entrer dans ce mystère: un couple avec un nouveau-né, des anges qui annoncent une grande joie, des chants et de la musique qui nous vont au cœur, des lumières qui illuminent la nuit. Et parmi les anges qui annoncent la Bonne Nouvelle, toutes ces personnes de bonne volonté, avec un cœur généreux, semblable à celui de Dieu.

* * * * *

L'un de vous est un Messie!
La Sainte Famille

Faites-vous un cœur plein de tendresse et de bonté, d'humilité, de douceur et de patience... (Colossiens 3, 12).

Lève-toi, prends l'enfant et sa mère, et fuis en Égypte (...) Lève-toi, prends l'enfant et sa mère et reviens au pays d'Israël (Matthieu 2, 13, 20).

 

L'abbé d'un monastère alla visiter un sage et lui raconta une histoire de malheur. Il avait été un temps où son monastère était célèbre à travers tout le monde occidental. Les cellules débordaient de jeunes aspirants et dans son église résonnait le chant des moines. Mais des temps durs étaient apparus pour son monastère. Il n'y restait plus qu'une poignée de moines, qui accomplissaient leurs tâches avec des cœurs alourdis.

     Or, voici ce que l'abbé voulait savoir : « Est-ce à cause d'un quelconque péché des nôtres que le monastère a été réduit à semblable état? »

     « Oui, dit le sage: un péché d'ignorance ».

     « Qu'est-ce à dire? »

     « L'un des vôtres est le Messie déguisé et vous n'en savez rien ». Cela dit, le sage ferma les yeux et reprit sa méditation.

     Tout au long du pénible voyage de retour au monastère, le cœur de l'abbé battait la chamade à la pensée que le Messie - oui, le Messie lui-même - était revenu sur terre et se trouvait justement là, dans le monastère. Comment se fait-il qu'il n'avait pas réussi à le reconnaître? Et qui pouvait-il bien être? Le frère cuisinier? le frère sacristain? le frère trésorier? le frère prieur? Non, pas lui: il avait trop de défauts, hélas. Par contre, le gourou avait dit qu'il était déguisé. Ces défauts mêmes ne constituaient-ils pas un de ses déguisements? Pensez donc : tous les frères du monastère avaient des défauts. Et l'un d'eux devait être le Messie!

     Rentré au monastère, l'abbé réunit les moines et leur raconta ce qu'il avait découvert. Ils se regardèrent mutuellement avec incrédulité. Le Messie? Ici? Incroyable! Mais il était censé exister ici sous un déguisement. Alors, peut-être. Et si c'était Untel ou Untel? Ou cet autre, là-bas? Ou ...

     Il y avait ceci de certain : si le Messie existait au milieu d'eux sous quelque déguisement, il est improbable qu'ils puissent le découvrir. Aussi, entreprirent-ils de traiter chacun avec respect et considération. « On ne sais jamais..., se disaient-ils en eux-mêmes dès qu'ils entraient en quelque rapport avec autrui: peut-être est-ce celui-ci ».

     Le résultat de tout cela fut que l'atmosphère du monastère rayonna la joie. Très tôt des douzaines d'aspirants demandèrent leur admission dans l'ordre et de nouveau résonna dans l'église le saint et pieux chant des moines qui rayonnaient l'Esprit d'amour (A. de Mello, Dieu est là, dehors, pp. 80-81).

LIEN: Marie et Joseph se sont sans aucun doute posé bien des questions à propos de l'Enfant, de son identité, de son devenir. Ils nagent en plein mystère. Mais ce sont des croyants fervents; aussi pressentent-ils à la suite de la conception de cet Enfant, de sa naissance, de l'avertissement de fuir la colère d'Hérode... qu'il s'agit d'un être étonnant et exceptionnel. L'évangéliste Matthieu fait ressortir la douceur, l'humilité, la patience de Joseph et la foi qui habite son coeur et celui de Marie. Tellement de questions, d'inquiétudes, de dérangements, mais en même temps tellement de courage, de confiance et de sérénité! Ils sont tout simplement ouverts à l'inattendu de Dieu, disponibles à son projet; et ils accueillent « le divin » caché dans tout ce qu'ils vivent.

     N'est-ce pas là un exemple pour les familles d'aujourd'hui quelles qu'elles soient. Chaque famille connaît des questions, des soubresauts, des ajustements nécessaires. Il importe que chaque personne soit reconnue dans sa dignité, traitée avec respect. Les « yeux de la foi » ne permettent-ils pas alors de considérer chaque membre de la famille comme un « messie déguisé » et de le traiter avec « tendresse et bonté, douceur et patience ».

 

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