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Archéologie
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chronique du 14 janvier 2011
 

Des sièges aux portes de la ville

Cette chronique a déjà fait rapport de la découverte de trois portes de ville salomoniennes, qui présentaient toutes le même plan et à peu de choses près, les mêmes dimensions. Si l’auteur revient sur le sujet, c’est pour attirer l’attention sur un détail de ces portes, détail que nous retrouvons bien attesté aux portes de Gézer, Megiddo, Hazar, Tell-el-Far’ah (Tirza), Mizpah, Beersabée, etc. En effet, à l’époque israélite, depuis la période des Juges, même, des banquettes sont dressées le long des murs des salles de ces portes; dans quel aspect se présentent-elles, et à quoi pouvaient-elles servir?

     Les portes de ville, dans l’Antiquité proche-orientale, étaient des constructions souvent gigantesques. Donnant accès à la ville, elles devaient donc être situées à un endroit qui présente le moins d’obstacles possible tant au piéton qu’à la charrerie; elle est ainsi bâtie à un point du site qui est de nature difficilement défendable. Comme la porte est elle-même une percée dans le rempart, nous voyons qu’elle présente une double faiblesse qu’il faut solidement colmater. Voilà pourquoi la porte de la ville doit être un énorme bastion qui résistera sans peine à l’assaut de l’ennemi.

     Ce bastion israélite se présente essentiellement comme une série de salles s’affrontant les unes les autres, alignées sur deux ou trois rangées. Une rampe d’accès monte le long de la pente pour aboutir à une avant-cour, elle-même défendue, qui précède immédiatement cette porte. On peut s’imaginer l’impression de force qu’offrait l’ensemble d’un tel ouvrage défensif.

Reconstitution de la porte de Tell el-Far’ah

Reconstitution de la porte de Tell el-Far’ah

     Les banquettes signalées au début de cet article se trouvent le long des murs des salles de la porte elle-même. On les voit très bien dans une des salles de la porte de Tel Dan et dans celles de Tel-el-Farah (A sur les plans). Elles ont souvent disparu lors des destructions mais celles qui ont survécu nous donnent une idée juste de leur structure.

     Elles ne dépassent pas beaucoup les 50 cm de hauteur, pour une largeur à peu près égale. Le cœur de l’ouvrage est fait de grosses pierres et de cailloutis, que l’on recouvre ensuite d’un plâtre dur, pour adoucir la surface. Ce dernier détail est un indice non équivoque de l’usage d’un tel dispositif : il est fait pour s’asseoir, comme nous le suggèrent aussi de nombreux textes de l’Ancien Testament. En effet, c’est à la porte de la ville que les Anciens siègent, que les transactions sont opérées, que les contrats sont signés, et, en général, que la cour de justice est dressée (voir Dt 21,19; 22,24; Am 5,10; Rt 4,1-11; Pv 31,23; Néh 3,1.18; sans doute Ps 1,1, etc.).

Reconstitution de la porte de Tel Dan

Reconstitution de la porte de Tel Dan

     Les fouilles de la ville de Dan, sorte de capitale de la région nord du royaume d’Israël (1 R 12,30), ont d’ajouté un nouveau détail à cette institution. En effet, les bases d’un petit podium carré étaient dressées dans l’avant-cour, et contre le mur extérieur de la porte (B sur le plan). À ses quatre coins et encore en place, on a trouvé les bases rondes de colonnettes. Elles sont taillées dans la pierre, offrant l’aspect d’un bol dont les parois sont ornées de corolles de fleurs (C sur le plan). Le sommet de ces bases présente une cavité ronde qui a été visiblement creusée pour recevoir le fût d’une colonnette sans doute en bois. Des bases à peu près identiques ont été trouvées en Syrie et en Assyrie, dans des palais royaux; elles sont aussi bien visibles sur des bas-reliefs ornant les palais de Ninive.

Podium à baldaquin pour le trône royal

Podium à baldaquin pour le trône royal

     D’après ces témoins, nous sommes ici en présence d’un petit podium à baldaquin, pour y placer le trône d’un dieu ou d’un roi. En Israël, on voit mal comment on a pu représenter Yahvé assis sur un tel trône; il nous faut plutôt songer à un trône royal, et ceci grâce encore au témoignage de l’Ancien Testament. C’est à la porte que David va s’asseoir pour y rencontrer son armée afin d’établir des plans militaires (2 S 19, 8-9); c’est surtout devant la porte de Samarie que des trônes royaux sont mentionnés pour Achab et Josaphat, réunis là en grand conseil de guerre, avant de monter à l’attaque des Araméens (1 R 22,10). Cette scène se passe au temps d’Achab (874-853 av. J.-C.), qui est aussi le bâtisseur de la porte de Dan, dans l’état que nous décrivons ici. L’archéologie nous montre bien que non seulement les activités juridiques courantes du petit peuple se passaient à la porte de la ville, mais que celle-ci était souvent le théâtre des grandes décisions royales qui présidaient aux destinées du même peuple.

Source : Parabole v/5, 1983.

Guy Couturier

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La divination par le foie

 

 

 

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