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chronique du 2 octobre 2015
 

Comment tester la fidélité de sa femme ?

Si vous êtes un mari jaloux, voici un texte qui pourrait peut-être vous inspirer. Par contre, si vous êtes une femme, il pourrait bien vous révolter. Voici ce que la Bible propose pour tester la fidélité d’une femme.

Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Parle aux fils d’Israël et dis-leur : Il peut arriver à un homme que sa femme se conduise mal et lui soit infidèle, qu’un autre ait à l’insu de cet homme des rapports avec elle, qu’elle se soit souillée en secret, sans qu’il y ait de témoin contre elle, sans qu’elle ait été prise sur le fait ; si alors un esprit de jalousie s’empare de cet homme et qu’il soupçonne sa femme, alors qu’elle s’est effectivement déshonorée, ou si un esprit de jalousie s’empare de cet homme et qu’il soupçonne sa femme, sans qu’elle se soit déshonorée, cet homme amènera sa femme au prêtre [… ]

Le prêtre fera approcher la femme et la fera comparaître devant le SEIGNEUR. Le prêtre prendra de l’eau sainte dans un vase de terre, il prendra de la poussière du sol de la demeure et la mettra dans l’eau. Le prêtre fera comparaître la femme devant le SEIGNEUR et la décoiffera ; il mettra sur ses mains ouvertes l’offrande de dénonciation, c’est-à-dire l’offrande de jalousie, tandis que lui-même aura à la main l’eau d’amertume qui porte la malédiction. Le prêtre fera prêter serment à la femme en lui disant : “S’il n’est pas vrai qu’un homme ait couché avec toi, que tu te sois mal conduite, que tu te sois déshonorée en trompant ton mari, sois préservée de la malédiction que porte cette eau d’amertume. Mais si au contraire tu t’es livrée à l’inconduite avec un autre que ton mari, si tu t’es déshonorée et qu’un homme qui n’est pas ton mari a eu des rapports avec toi…” Le prêtre lui fera prêter le serment d’imprécation en lui disant : “Que le SEIGNEUR fasse de toi, au milieu de ton peuple, l’exemple qu’on cite dans les imprécations et les serments. Qu’il fasse dépérir ton sein et enfler ton ventre. Cette eau qui porte la malédiction va pénétrer dans tes entrailles pour faire enfler ton ventre et dépérir ton sein.” Et la femme répondra : “Amen, amen !” Puis le prêtre mettra par écrit ces imprécations et les dissoudra dans l’eau d’amertume. Il fera boire à la femme l’eau d’amertume qui porte la malédiction ; cette eau qui porte la malédiction pénétrera en elle en devenant amère. Le prêtre prendra de la main de la femme l’offrande de jalousie, il la présentera au SEIGNEUR et l’apportera sur l’autel. 

Le prêtre prélèvera sur la farine de l’offrande une poignée comme mémorial et la fera fumer sur l’autel ; après quoi il fera boire l’eau à la femme. Il lui fera boire l’eau et il arrivera ceci : si elle s’est souillée et qu’elle a été infidèle à son mari, l’eau qui porte la malédiction pénétrera en elle en devenant amère ; son ventre enflera et son sein dépérira. Et cette femme deviendra pour son peuple l’exemple qu’on cite dans les imprécations. Si au contraire cette femme ne s’est pas déshonorée mais qu’elle est pure, elle sera innocentée et elle sera féconde. »

Telle est la loi sur la jalousie pour une femme qui se livre à l’inconduite en trompant son mari et se déshonore, ou pour un homme qui est saisi d’un esprit de jalousie et soupçonne sa femme : il la fera comparaître devant le SEIGNEUR et le prêtre lui appliquera toutes les prescriptions de cette loi. L’homme sera exempt de faute et la femme, quant à elle, répondra de sa faute. (Nombres 5,11-31)

     Ce test de fidélité maritale est attribué au Seigneur. Il montre bien que la Bible contient des textes écrits par des hommes et pour des hommes. Et, dans ce cas-ci, pour des hommes mariés qui soupçonnent leur femme d’infidélité.

     La recette est simple : amener sa femme au prêtre pour qu’elle boive une eau d’amertume. Il s’agit d’une eau toxique. Le livre de l’Exode (15,23) utilise la même expression pour désigner l’eau que le peuple au désert refuse de boire parce qu’elle est impropre à la consommation.

     Ce rite n’est pas exclusif au monde biblique. Les jugements de Dieu ou « ordalies » étaient pratiqués dans l’Ancien Orient, mais aussi en Europe, au Moyen Âge. Lorsque l’on manquait de preuves pour accuser quelqu’un, on pouvait se servir d’un rite comparable pour le condamner ou l’acquitter. Cette façon de faire a certainement une origine magique, réinterprétée par la Bible pour en faire une pratique religieuse approuvée par le Seigneur.

Et la femme?

     D’un point de vue féminin, ce texte est très dérangeant. Le seul moment où la femme peut prendre la parole, ce n’est pas pour se défendre ou s’expliquer, mais pour dire : « Amen, amen! », ce qui est une façon pour elle de souscrire aux paroles prononcées contre elle par le prêtre. Ainsi, elle souhaite elle-même que son ventre enfle et que ses entrailles dépérissent. Je doute que ce soit réellement ce que les femmes souhaitaient…

     Le dernier verset est particulièrement choquant : « Le mari sera exempt de faute. » Même si le test révèle que la femme a été faussement accusée, elle ne pourra rien dire ou faire contre son mari, qui a l’immunité totale. D’ailleurs, rien n’est prévu pour les hommes infidèles. Ce n’est pas une surprise, car dans cette culture où la polygamie est acceptée, un homme peut coucher avec n’importe quelle femme, pourvu qu’elle ne soit pas déjà mariée à un autre homme.

La suite du test…

     L’extrait choisi mentionne seulement que la femme coupable devra répondre de sa faute. Le problème, c’est que la mort est la sentence associée à l’adultère. Elle doit être appliquée à la femme prise en défaut (Lévitique 20,10; Deutéronome 22,22-24; Ézéchiel 16,38-40). Normalement, l’exécution se fait par lapidation (Deutéronome 22,20-22).

     Ce texte est un bon exemple que les lecteurs d’aujourd’hui ne peuvent pas simplement prendre la Bible au pied de la lettre. Il va s’en dire que ce passage traite d’une pratique qui n’a plus sa place dans le monde actuel.

Texte complet dans Zombies, licornes, cannibales… Les récits insolites de la Bible, Sébastien Doane, Montréal, Novalis, 2015.

Sébastien Doane

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