(Patrick Schneider / Unsplash)

La bonne nouvelle du salut – AT 25

Paul-André DurocherPaul-André Durocher | 24 février 2025

Référence biblique : Isaïe 40, 9-17
Liturgie des Heures : Jeudi III — Laudes

9 Voici votre Dieu.
10Voici le Seigneur Dieu!

Il vient avec puissance;
son bras lui soumet tout.
Avec lui, le fruit de son travail;
et devant lui, son ouvrage.

11 Comme un berger, il fait paître son troupeau :
son bras le rassemble.
Il porte ses agneaux sur son cœur,
il mène au repos les brebis.

12 Qui a mesuré dans sa main les eaux des mers,
jaugé de ses doigts les cieux,
évalué en boisseaux la poussière de la terre,
pesé les montagnes à la balance et les collines sur un crochet?

13 Qui a jaugé l’esprit du Seigneur?
Quel conseiller peut l’instruire?

14 A-t-il pris conseil de quelqu’un pour discerner,
pour apprendre les chemins du jugement,
pour acquérir le savoir et s’instruire des voies de la sagesse?

15 Voici les nations, comme la goutte au bord d’un seau,
le grain de sable sur un plateau de balance!
Voici les îles,
comme une poussière qu’il soulève !

16 Le Liban ne pourrait suffire au feu,
ni ses animaux, suffire à l’holocauste.

17 Toutes les nations, devant lui, sont comme rien,
vide et néant pour lui.

Sens original. Le chapitre 40 ouvre une nouvelle section du livre d’Isaïe, beaucoup plus tardive que la première. En effet, les 39 premiers chapitres ont été rédigés au VIIIe siècle avant Jésus-Christ, à l’époque où Jérusalem était menacée par l’empire assyrien. À partir du chapitre 40, le contexte a changé : une nouvelle puissance ennemie, l’empire babylonien, a conquis Jérusalem et déporté le peuple en Exil. Nous sommes donc au VIe siècle avant Jésus-Christ. Mais un nouveau prophète, qu’on nomme souvent le second Isaïe, prend le relais du premier pour encourager le peuple dans cette situation catastrophique. Il annonce que Dieu interviendra bientôt pour restaurer la fortune d’Israël. Dans le verset 9, il donne un titre spécial au contenu de son message. Il l’appelle une « bonne nouvelle » ou un « évangile ».

Il affirme que Dieu lui a donné la mission de proclamer ce message au peuple : « Monte sur une haute montagne, toi qui portes la bonne nouvelle à Sion. Élève la voix avec force, toi qui portes la bonne nouvelle à Jérusalem.» (Is 40,9) Le cantique AT 25 est composé des premiers versets qui présentent le contenu de cet évangile.

Il annonce d’abord le retour de Dieu qui s’avance triomphalement vers sa capitale comme un roi victorieux, précédé des prisonniers et du butin qu’il a conquis dans une bataille décisive.

Mais ce ton militaire ne dure pas longtemps. Voilà que Dieu emprunte les traits d’un berger qui accompagne ses brebis avec soin, portant dans ses bras les animaux les plus faibles, les gardant tout près de son cœur.

Ce Dieu, à la fois puissant comme un général d’armée et doux comme un pasteur de brebis, comment donc pourrait-il changer l’histoire et renverser l’empire babylonien qui, jusqu’à ce jour, semblait invincible ? Le prophète répond par une série de questions rhétoriques qui soulignent la toute-puissance du Dieu créateur et sa sagesse incomparable.

La conclusion s’impose : comparés à Dieu, les royaumes et les empires ne sont que de pauvres fantômes éphémères qui ne peuvent pas faire le poids. Dieu peut donc disposer l’histoire selon sa volonté. Et sa volonté, dans cette nouvelle conjoncture historique, c’est de sauver son peuple et de le mener à nouveau vers son pays.

À la lumière de l’Évangile. L’expression dont Isaïe se sert pour désigner le contenu de son message — « bonne nouvelle » — a été adoptée par la jeune Église pour parler de l’enseignement de Jésus et de sa résurrection d’entre les morts. Saint Paul la reprend dans son introduction à sa lettre aux Romains : « Paul, serviteur du Christ Jésus, appelé à être Apôtre, mis à part pour l’Évangile de Dieu, à tous les bien-aimés de Dieu qui sont à Rome. Cet Évangile, que Dieu avait promis d’avance par ses prophètes dans les saintes Écritures, concerne son Fils qui, selon la chair, est né de la descendance de David et, selon l’Esprit de sainteté, a été établi dans sa puissance de Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts, lui, Jésus Christ, notre Seigneur. » (Rm 1,1 -4)

Les quatre textes que nous appelons « évangiles » mettent en forme narrative cette bonne nouvelle qui ne concerne plus la victoire de Dieu sur Babylone, mais sur les puissances du mal et de la mort. De plus — aspect essentiel de l’enseignement de Paul — cette victoire n’a pas seulement un impact sur Israël, mais sur toute l’humanité. En effet, nous sommes tous esclaves du péché, nous sommes tous en exil spirituel ; mais en Jésus, Dieu est intervenu pour nous libérer et nous mener vers notre vraie patrie. En Jésus, Dieu se révèle tout-puissant… mais surtout tout aimant, rempli de compassion pour tous ses enfants, surtout les plus chétifs et les moins nantis. Jésus est vraiment le bon berger que nous attendions : il nous porte sur son cœur et nous ramène chez nous, chez lui.

Dans ma vie. « Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile ! » (1 Co 9,16) Ces quelques mots de saint Paul m’interpellent. Est-ce que je ressens la même urgence que lui ? Est-ce que je reconnais la voix de Dieu qui m’envoie comme elle a envoyé le deuxième Isaïe ? Si je crois vraiment en l’Évangile de Jésus, ne devrais-je pas, moi aussi, prendre part à cette mission ?

Trop souvent dans ma vie, je me contente de lire les évangiles, de les méditer, d’essayer de suivre leur enseignement. Je me réjouis de connaître Jésus-Christ, source d’espérance dans ma vie. Mais j’oublie facilement que cette bonne nouvelle est destinée à toute l’humanité. Malheureusement, trop de gens n’en sont pas conscients. Ils ignorent la vie et le message de Jésus. Ils ne connaissent pas la joie d’être aimés par un Dieu qui ne veut rien d’autre que leur bonheur. Ils méconnaissent le don de l’Esprit qui pourrait les éclairer et leur donner la force nécessaire pour cheminer à la suite du Christ.

Si j’aime vraiment les autres, je devrais avoir le goût de partager avec eux le plus beau cadeau que je connais : la joie de l’Évangile.

Dans le plan de Dieu. Le renversement de fortune annoncé par le prophète Isaïe s’est réalisé lorsque le peuple juif a pu rentrer dans son pays pour y restaurer sa capitale et rebâtir son Temple. Cet événement, comme la sortie de l’esclavage en Égypte bien des siècles auparavant, manifeste que Dieu se situe du côté de la liberté, du plein épanouissement de ses enfants. La prophétie d’Isaïe peut ainsi être comprise comme une évocation partielle et ponctuelle du plan de salut de Dieu pour toute l’humanité, plan qui s’est concrétisé de façon radicale dans la venue de son Fils et qui se réalisera pleinement à la fin des temps.

Cette prophétie nous invite à accueillir le plan de salut de notre Dieu comme le cadre qui structure l’histoire du monde. Mais sa dimension cosmique engage aussi chaque vie humaine alors que Dieu nous attire vers la vraie liberté, la vie en abondance.

Nous cheminons donc dans l’espérance, malgré l’épreuve du temps présent. Avec le prophète, nous professons notre foi en un Dieu qui vient à notre rencontre : « Voici notre Dieu. Voici le Seigneur Dieu!»

Mgr Paul-André Durocher est archevêque de Gatineau (Québec).

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Trésors de la prière juive et chrétienne, les psaumes n'en demeurent pas moins des textes qui demandent parfois d'être apprivoisés. Cette chronique propose une initiation aux psaumes et à la prière avec les psaumes.